Cartographier la vallée de la Roya

, par  Jean-Luc Chiavarino-Mercier , popularité : 20%

Il y a deux ans, au début d’octobre 2020, la tempête Alex frappe l’arrière-pays niçois, et plus particulièrement les vallées de la Vésubie et de la Roya. Cette catastrophe projette sur la scène médiatique nationale l’histoire et la géographie d’une vallée enclavée à l’extrême sud-est de l’hexagone. Ce n’est pourtant pas la première fois, ces dernières années, que la Roya se retrouve à la Une. Depuis 2015, les exilés tentent d’entrer en France par la frontière italienne. Repoussés sur le littoral, ils et elles tentent l’aventure à travers les sommets de la Roya, attirant le regard vers ces nouvelles routes de l’exil, qui reprennent parfois les chemins empruntés par les Italiens et Italiennes fuyant le fascisme à partir des années 1920.

C’est le retour de la frontière, des contrôles et de la traque aux personnes indésirables. Le retour d’une frontière effacée, dont les traces sont pourtant présentes partout dans le paysage d’une vallée coupée en deux pendant près d’un siècle, partagée entre la France et l’Italie de 1860 à 1947.

La Roya est donc un espace privilégié pour mener des études de cas qui peuvent s’inscrire à plusieurs titres dans les programmes du secondaire. J’ai choisi d’imaginer une séquence qui se tienne plutôt dans le programme de géographie de Terminale TC, le "Thème 3 – L’Union européenne dans la mondialisation : des dynamiques complexes", dans "La France : les dynamiques différenciées des territoires transfrontaliers". C’est pourquoi l’on retrouve dans la carte et l’activité des références à l’Union Européenne, acteur important des dynamiques transfrontalières... et aussi cadre juridique et politique mis à mal par la gestion des migrations depuis quelques années, suscitant des tensions mais aussi de nouvelles formes de coopération entre la France et l’Italie.

L’objectif pédagogique peut être de faire construire la légende aux élèves, de manière plus ou moins guidée selon le temps accordé à une activité potentiellement chronophage qui arrive en fin d’année.

La carte et sa légende au format PDF
La carte sans la légende aux formats PNG et PDF
Les éléments de la légende sans le texte

Pour accompagner cette activité, un ensemble d’images augmentées permet de construire la légende pas à pas. Je n’ai pas réalisé de questionnaire d’accompagnement, faute de temps ; les documents présentés sont le plus souvent très explicites.

https://www.thinglink.com/scene/163...

Lien vers le "Thinglink"

Le point d’exclamation dirige vers une introduction qui prend la forme d’une carte narrative réalisée sur Edugeo (lien direct). Ensuite, les étapes 1 à 5 emmènent (virtuellement, malheureusement) les élèves dans les paysages de la Roya. Chaque vue à 360° comporte des indications géographiques et des documents. Un guide permet d’accompagner les collègues, que je reproduis ci-après.

Guide d’accompagnement des images augmentées

Etape 1
La première vue du col de Tende permet de montrer le relief particulièrement marqué de la vallée. La vue comprend des repères géographiques, et un lien vers une autre vue, à l’entrée du tunnel de Tende dans laquelle des explications permettent de comprendre l’enclavement de la haute-Roya notamment à la suite de la Tempête Alex. De retour sur la vue du col de Tende, un lien vers une carte réalisée sur Edugeo permet éventuellement d’étudier les risques présents dans la vallée et la tempête Alex, via un atlas des zones inondables (lien direct vers la carte sur Edugeo) réalisé sur le modèle de celui proposé pour la vallée de la Vésubie par Jackie Pouzin.

Etape 2
La vue de la route permet de plonger dans la vallée, et d’apercevoir le village de Saorge perché à flanc de montagne. C’est l’occasion de découvrir l’importance des axes de communication, et notamment de la ligne de chemin de fer. Un schéma présente les mobilités quotidiennes dans l’est des Alpes-Maritimes, pour commencer à aborder la question des mobilités, tout comme la carte des flux de travailleurs transfrontaliers, où l’on constate que les dynamiques transfrontalières sont très réduites au regard des autres régions frontalières françaises. Aussi, un lien vers une carte statistique réalisée sur Edugeo montre la population des villages de la vallée comparée à l’agglomération mentonnaise et permet de déduire la faible densité de population de la Roya.

Etape 3
La vue de la curiosité de la gare de Saint-Dalmas-de-Tende donne l’occasion d’une mise en perspective géohistorique. Cette gare, construite sur la volonté de Mussolini, d’une taille démesurée, faisait office de gare frontalière jusqu’au rattachement des communes de Tende et de la Brigue au territoire français en 1947. Justement, une carte permet de visualiser la frontière séparant la vallée de 1860 à 1947 et la forte militarisation de celle-ci. On pourrait évoquer la bataille de l’Authion d’avril 1945.

Etape 4
La vue d’un chemin muletier qui traverse la frontière franco-italienne à 1500m d’altitude permet d’aborder la question des mobilités migratoires, depuis la « crise migratoire » de 2015 et la fermeture de la frontière française. Un extrait de reportage sur l’aide apportée aux exilés par Cédric Herrou en 2016 permet de se remettre dans le contexte de l’époque, tandis qu’une carte du Monde donne à voir plus largement les parcours exiliques à l’échelle des Alpes franco-italiennes. D’autres documents complètent cette approche des mobilités empêchées, qui permettent de réfléchir à la légende de la carte. Par ailleurs, une vidéo évoquant le retour du loup dans les Alpes-Maritimes depuis l’Italie, à la faveur du Parc National du Mercantour, permet d’interroger le sens de la « frontière » dans le cadre de mobilités animales !

Etape 5
On termine la découverte de la Roya en remontant vers les sommets, au pied du Mont Bego qui marque l’entrée de la Vallée des Merveilles. Il s’agit de comprendre, de manière plus ou moins approfondie selon le temps imparti, les logiques de coopération transfrontalière dans le cadre de la protection de l’environnement sous l’égide de l’Union Européenne. Il est possible d’évoquer le tourisme de montagne et de grande randonnée, l’un des principaux atouts de la vallée.